Soutenance de thèse

Le Mercredi, 26. novembre 2025 -
14:00 - 19:00
Salle des Actes à l’Université de Montpellier Paul-Valéry - Site Saint Charles

M. Serigne NDIAYE

Soutiendra mercredi 26 novembre 2025 à 14 h

Salle des Actes n° 011 à l’Université de Montpellier Paul-Valéry, Site Saint-Charles 1

une thèse de DOCTORAT

Discipline : Sociologie

Titre de la thèse : Expansion urbaine, trajectoires familiales et enjeux de justice spatiale dans la périphérie de Dakar (Sénégal) des années 2000 à nos jours

Composition du jury :

  • Mme Monique BERTRAND, Directrice de recherche, IRD
  • M. Sylvain FAYE, Professeur, Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Sénégal), codirecteur de thèse
  • M. Sten HAGBERG, Professeur, Université d’Uppsala (Suède)
  • M. Philippe LAVIGNE DELVILLE, Directeur de recherche, IRD, directeur de thèse
  • Mme Paule MOUSTIER, Professeure, CIRAD
  • M. Cheikh Abdou Wakhab NDIAYE, Professeur, Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Sénégal)
  • M. Jean-Pierre OLIVIER DE SARDAN, Directeur d’études émérite, EHESS

Résumé de la thèse :

Au Sénégal, l’expansion urbaine de Dakar entraîne une reconfiguration de l’espace périphérique de la capitale. Malgré sa vocation agricole, ce dernier fait l’objet de processus massif de conversion des terres au profit de l’habitat. Ces conversions appelées aussi changement des usages des sols de l’agriculture vers l’urbain résultent de l’action de différents types d’acteurs, en concurrence, qui mobilisent des registres différents pour accéder aux terres et contrôler leur transformation en habitation. En effet, le droit coutumier est toujours ancré dans la mémoire collective des occupants actuels des terres agricoles (villageois principalement, mais aussi citadins - propriétaires de vergers leur ayant acheté les terres) alors que la réforme foncière de 1964 (la loi sur le domaine national) qui constitue la seule référence au plan juridique et administratif l’a aboli. La conversion de terre peut ainsi être menée à l’initiative de l’État, ou d’acteurs privés (promoteurs immobiliers, hommes d’affaires, etc.) qui ont bénéficié d’attributions foncières de la part de l’État, mais aussi des occupants des terrains agricoles, ou des communes. Les lotissements communaux résultent de compromis entre communes et détenteurs fonciers, ficelés à travers des « protocoles d’accords » qui explicite le partage des futurs lots d’habitation et fait intervenir d’autres acteurs (géomètres, courtiers de l’urbanisation, etc.). In fine, la conversion des terres provoque un transfert de la propriété vers des acquéreurs aux profils sociologiques très variés.
Elle conduit aussi les acteurs agricoles à cultiver dans un contexte d’incertitude foncière. Pour beaucoup d’agriculteurs, cette incertitude vient de leurs statuts précaires sur les terres qu’ils exploitent qui relèvent du droit coutumier. Dans ce dernier cas de figure, ils sont obligés de négocier avec les propriétaires les parcelles à exploiter dans une temporalité incertaine. Face à la rareté croissante des terres arables, des exploitants vont à la quête de foncier agricole hors de leurs terroirs d’origine. Pour ceux qui restent sur place, la reconversion professionnelle dans d’autres secteurs de la vie active (maçonnerie, transport, commerce, etc.) se présente comme une alternative. Les reconversions professionnelles hors agriculture ne suivent pas un parcours linéaire simple mais résultent d’une construction faisant appel à plusieurs ressources diversement combinées (réseau relationnel, mobilisation de capital économique, mobilisation de savoir-faire, etc.). Ces trajectoires de reconversions sont traversées par des épreuves plurielles avec lesquelles les anciens maraîchers doivent composer. Nos analyses montrent des parcours réussis, mais aussi des échecs accentuant la vulnérabilité des personnes engagées.
La conversion des terres provoque souvent des dépossessions foncières causées par les attributions de terrain par l’État à des acteurs privés sans prise en compte des occupants actuels. Ces derniers tentent de s’opposer à ces dépossessions à travers des mobilisations sociales aux trajectoires complexes et dont la médiatisation est de plus en plus portée par des médias sociaux. Nous les avons analysées sous le prisme de l’interaction du triptyque justice, injustices sociales, espace et donc de la justice socio-spatiale. Les sentiments d’injustices exprimés par les occupants des terres face aux dépossessions foncières dont ils se considèrent être des victimes recentrent les revendications sur les questions de la reconnaissance, de la citoyenneté, de la justice procédurale et distributive.

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In Senegal, Dakar’s urban expansion is leading to a reconfiguration of the capital’s outskirts. Despite its agricultural vocation, this area is undergoing a massive process of land conversion for housing. These conversions, also known as change in land use from agricultural to urban, are the result of the actions of various competing actors who use different means to gain access to land and control its transformation into housing. Customary law is still deeply rooted in the collective memory of current occupants of agricultural land (mainly villagers, but also city dwellers who own orchards an have purchased the land), even though the 1964 land refrom (the law on national property), which is the only legal and administrative reference, abolished it. Land conversion can thus be carried out on the initiative of the State, or of private actors (real estate developers, businessmen, etc.) who have benefited from land allocations from the State, but also of the occupants of agricultural land, or of municipalities. Municipal housing developments are the result of compromises between municipalities and landowners, formalized through “memoranda of undestanding” that specify the division of future residential lots and involve other actors (surveyors, urbanization brokers, etc.). Ultimately, land conversion leads to a transfer of ownership to buyers with very diverse sociological profiles.
It also leads agricultural actors to farm in a context of land tenure uncertainty. For many farmers, this uncertainty stems from thier precarious status on the land they farm, which is governed by customary law. In the latter case, they are forced to negociate with landowners for plots for farm for an uncertain period of time. Faced with the increasing scarcity of arable land, farmers are seeking agricultural land outside their home regions. For those who remain in place, professional retraining in other sectors of working life (masonry, transport, commerce, etc.) is the alternative. This professional retraining outside agriculture does not follow a simple linear process involving a combination of various resources (personal networks, mobilization of economic capital, mobilization of know-how, etc.). These retraining paths are fraught with multiple challenges that former market gardeners must overcome. Our analyses show successful paths, but also failures that accentuate the vulnerability of those involved.
Land conversion often leads to land dispossession caused by the state allocating land to private actors without taking into account the current occupants. The latter attempt to oppose this dispossession through social mobilization campaigns with complex trajectories, which are increasingly covored by social media. We have analyzed these movements through the prism of the interaction between justice, social injustice, and space, and thus social-spatial justice. The feelings of injustice expressed by land occupants facing dispossession, of which they consider themselves victims, refocus demands on issues of recognition, citizenship, procedural justice, and distributive justice.

Dernière mise à jour : 06/11/2025